CULTURE

 


"Shin Angel" de U-jin.
Photo: D.R.
Le manga,
trop en dessous de la ceinture ?

Les mangas, en France, c’était Les Chevaliers du Zodiaque il y a dix ans et ce sont les Pokemon aujourd’hui. Pendant cette décennie, les séries, les films d’animation et les illustrés japonais ont trouvé un public hexagonal de plus en plus large. Mais la production des dessinateurs japonais est loin de se limiter à ces gros succès commerciaux. Et en plein milieu d’une histoire toute innocente, ils se permettent les allusions (voire plus) les plus grivoises.


A la fin des années 80, le Club Dorothée, la gare d’arrivée des mangas en France, diffusait Dragon Ball. Un petit garçon avec une queue de singe partait en quête de boules de cristal avec une foule de compagnons. L’un d’eux, le maître en arts martiaux Tortue Géniale, semblait très attiré par les jolies jeunes filles. Ainsi, devant une sirène, il prenait une attitude libidineuse et lui demandait s’il pouvait lui toucher les… écailles !
Le Club Dorothée n’est pas le Japon. A nous les écailles de poisson, à eux les seins et les allusions répétées à la petite culotte des héroïnes. Quand la version papier de Dragon Ball est enfin arrivée en France, justice fut rétablie : le travail de l’auteur, Akira Toriyama, fut correctement traduit.
De la même façon, à chaque fois que le héros de Nicky Larson annonçait, en France, aller prendre un verre, au Japon, c’est dans un hôtel de passes qu’il se rendait.

L'infirmière très concernée de "Dr. Feelgood"
Photo:D.R.
Alors, les Japonais sont-ils obsédés ou les Français sont-ils prudes ? À en juger par l’état des choses, en tout cas, au moins un des deux peuples a évolué. Les mangas en tous genres ont envahi les rayons des librairies françaises, et certains vont bien au-delà des simples coquineries de Dragon Ball.

Erotisme ou pornographie ?

S’il fallait « sexualiser » le lectorat des mangas, trois catégories se démarqueraient. Les demoiselles se dirigent de préférence vers les shôjô mangas : un dessin très fin, des hommes androgynes à la sexualité ambiguë, un discours écologiste et une intrigue sentimentale évoluée. Les jeunes garçons, eux, se retrouvent plutôt dans les shonen mangas : de l’humour potache, beaucoup d’action et du surnaturel. Enfin, les seinen mangas s’adressent au public masculin de plus de vingt ans. C’est une version plus évoluée des shônen, empruntant aux mondes politique et des affaires pour ses trames.
Pour chacun de ces genres, il existe des mangas « soft » et d’autres nettement moins grand public. Et, bien entendu, ces derniers s’adressent surtout aux jeunes hommes. Il est difficile de parler de pornographie, du moins pas comme elle existe en Occident. Le dessin animé Le Docteur Feelgood met en scène un sexologue plutôt proche de ses patientes et c’est l’humour de la série qui en fait son intérêt.
Si l’érotisme paraît si présent dans le manga, par rapport à la bande-dessinée européenne et surtout au comics américain, c’est qu’il permet à une population avide de fantasmes de les assouvir par la lecture.
Ce qui n’empêche pas le maître de l’animation japonaise, Hayao Miyazaki, de porter sur grand écran des chefs-d’œuvre comme Princesse Mononoke et Le Voyage de Chihiro sans aucune arrière-pensée.

Sébastien Raffaelli
04/04/2003 17h30

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