CULTURE

Architecture banale et moderne,
qui se doute de ce qu'elle abrite ?

Photo: D.R.

 

La rue Louise Weiss
Nouveau pôle d'art contemporain

 

Il y six ans, six galeries s'installaient dans ce quartier neuf et déserté. Aujourd'hui, le succès est total : chaque vernissage rassemble 2000 à 4000 visiteurs.

Il y a dix ans, la rue Louise Weiss n'existait pas. Ce n'était qu'un chantier perdu au cœur d'un treizième arrondissement en construction. Le 1er avril 1997, séduites par cette nouvelle rue proche de la toute récente Bibliothèque François Mitterrand et du Batofar, péniche musicale tendance, six jeunes galeries s'unissent pour y créer un lieu dédié à l'art vivant. Leurs noms ? Praz-Delavallade, Emmanuel Perrotin, Air de Paris, Art : Concept, Almine Rech, Jennifer Flay. Qui aurait cru que cet espace qui n'intéressait personne deviendrait un nouveau pôle artistique branché ? Pas grand monde assurément.

La démarche des six galeries pionnières était nouvelle et osée : mettre en commun leurs informations, leurs fichiers informatiques. Et la formule s'avère payante : l'impact de leurs initiatives semble décuplé. Horaires d'ouvertures harmonisés, événements communs (vernissages, expositions, projets d'édition), service presse unique. Ce qui n'empêche pas chaque galerie de conserver son identité.

L'entrée de la galerie Air de Paris.
Photo: D.R.
L'association qui s'appelait "Scène Est" s'est rebaptisée "Rue Louise Weiss", puis, plus simplement, "Louise". Six au départ dans la seule rue Louise Weiss, les galeries, aujourd'hui au nombre de treize, ont colonisé les rues voisines du Chevaleret, Duchefdelaville, Gourdault et Charcot. Bientôt peut-être, elles seront quatorze : le collectif attend que la nouvelle venue fasse ses preuves. Car Louise n'est pas une fille facile. N'y entre pas qui veut. "On ne veut pas de travail de seconde main" explique Sandy Hattab, l'attachée de presse de l'association, qui insiste sur la nécessité d'innover. "On n'a pas hésité à soutenir Corentin Hamel, un jeune de 25 ans qui montait sa première galerie. Parce qu'il avait pris des risques". Et l'indépendance des galeries ? "Elle est totale, l'association n'a pas son mot à dire sur le choix des artistes".

Un plan de la rue et ses galeries figure
dans le guide édité par l'association Louise
.
Photo: D.R.
Tendance mais pas snob

Linda travaille depuis deux ans à la Galerie Jousse dont dépend aussi, un peu plus haut dans la rue, une annexe consacrée au mobilier. Le regroupement, sous l'égide d'une association, de galeries avec les mêmes horaires (11h-19h), et par conséquent les mêmes visiteurs… Cela ne crée-t-il pas une certaine concurrence ? "Non, car on ne présente pas les mêmes artistes", répond l'élégante jeune femme. "Chaque galerie fonctionne avec une dizaine d'artistes qui tournent". Et la programmatuion est assez éclectique : vidéos, photos, sculptures de néons (Martin Boyce chez Art Concept), créations d'inspiration manga (Takashi Murakami chez Emmanuel Perrotin), mobilier futuriste (François Bauchet à la galerie Kreo).

Très vite, le quartier est devenu à la mode. "Mais ce n'est pas très snob", précise Sandy Hattab, de l'association Louise. Le dernier vernissage, qui a eu lieu samedi 26 avril entre 12 et 21 heures, a rassemblé, selon elle, 4000 personnes. Les douze galleries ainsi que la librairie Images Modernes s'étaient unies comme d'habitude pour l'inauguration de leurs nouvelles expositions. L'arrivée dans le quartier du nouveau cinéma MK2 bibliothèque réjouit les galeristes. Leurs artistes vont pouvoir exposer dans des espaces que le cinéma réserve à l'art contemporain.

Quelle métamorphose en l'espace de six ans ! Et dire que certains plans de Paris continuent toujours d'ignorer cet axe où fleurit l'art vivant. La rue Louise Weiss serait-t-elle un mirage ?

Julien Barret
03/05/03 15 heures

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