"Les conditions d'un désastre humanitaire persisitent
dans le pays." Ramiro Lopez da Silva, le nouveau coordinateur
des Nations Unies en Irak, a choisi ce week-end pour tirer la
sonnette d'alarme. Poursuite des incidents armés, arrêt
quasi total des services publics, malnutrition: la situation est
critique. Les organisations non gouvernementales (ONG) présentes
sur place estiment que la vie de deux tiers des 25 millions d'Irakiens
dépend aujourd'hui de l'aide humanitaire.
Les sujets d'inquiétude ne manquent pas. L'Organisation
mondiale de la Santé (OMS) s'est donné pour tâche
d'aider à la remise en état du secteur de la santé,
d'améliorer les conditions sanitaires, les ressources en
eau, en nourriture, de favoriser l'accès à l'éducation
ou encore d'éliminer les munitions qui n'ont pas encore
explosé.
Malgré l'urgence, le processus peine à se mettre
en marche. Les véhicules de l'ONU ont commencé à
silloner le pays il y a seulement huit jours et un seul cargo
affrété par le Programme alimentaire mondial (PAM)
est arrivé à Oum Qasr, dans le sud du pays. L'UNICEF
et le PAM reprennent peu à peu contact avec leur réseau
local.
Mais le principal problème reste le manque de médicaments
et de personnel dans les hôpitaux. Ils ont été,
pour la plupart, pillés dès la fin des combats et
n'ont toujours pas retrouvé leur niveau d'activité
antérieur. Les médicaments manquent donc cruellement
alors que les infections se multiplient dans le sud du pays où
l'eau reste d'une qualité douteuse. Mais le personnel manque
aussi à l'appel. Washington a nommé samedi un nouveau
ministre de la santé et distribué un salaire de
20 dollars (17 euros) à tous les employés pour les
inciter à reprendre le travail.
Manque de sécurisation
L'anarchie qui règne encore en Irak malgré la fin
des combats accentue les difficultés, rendant encore délicat
l'envoi de personnel dans le cadre des ONG et de l'ONU. Et la
situation n'a de cesse de se dégrader. Dans la capitale,
où les forces de polices sont embryonnaires en dehors des
1 200 militaires américains déployés, les
armes circulent librement et des gangs naissent peu à peu
dans la rue. A Sadr-city, une aggomération pauvre de la
capitale, un médecin de l'hôpital s'inquiète:
"Trois à cinq personnes meurent chaque jours de
suites de blessures par balles, survenues lors de réglements
de comptes."
Conséquence: l'hostilité envers les Etats-Unis grandit
au sein de ces ONG qui dénoncent en choeur l'incompétence
des forces américaines à rétablir l'ordre
et à sécuriser leurs opérations. Le docteur
Morten Rostrup, président international de Médecins
Sans Frontière, a ouvertement exhorté les Washington
à faire de l'amélioration de la santé une
priorité en Irak en soulignant que "les forces
américaines ne s'étaient pas donné les moyens
d'aider les hôpitaux du pays qui soignent les malades et
les blessés."
Pour contribuer à résorber ce début de crise
humanitaire, la collaboration entre les Nations Unies et Washington
devra se normaliser rapidement. Même si les Etats-Unis ont
jusqu'ici marginalisé l'organisation internationale en
ne lui reconnaissant aucun rôle politique.
Sarah
Brèthes
05/05/2003 18heures
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